Je viens de passer quelques jours à me battre avec des mots... Ce sont eux qui gagnent à chaque fois...
Cette fois il s'agit d'une histoire un peu plus longue que d'habitude pour le prochain recueil de nouvelles collectives des éditions. Toute l'histoire se déroule 17 Avenue Ledru Rollin. C'est une espèce de clin d'oeuil à George Perec et sa tentative d'épuisement d'un lieu Parisien. Je sais que le sujet amusera notre chère Dominique de Liège. Par contre moi, j'écris l'histoire sans connaître le lieu. Dans mon imagination j'ai fait la description relativement précise d'un bâtiment et de sa cour intérieure. De ces habitants et de leur histoire. Jeudi dernier comme je passais dans le quartier j'ai décidé d'aller voir l'immeuble qui à servit de décor au récit. En fait je craignais qu'il n'existe pas, mais il était bien là... Il est plus vrai que nature. Plus que dans mon imagination et mes descriptions. En passant devant la porte alors qu'elle était entrouverte j''avais l'impression d'être un agent secret, un enquêteur allant vérifier sur les lieux d'un crime. Tout concorde, le lieux, les faits. Sauf que tout dans mon récit est le fruit de mon imagination. Un femme qui sortait du vieil ascenseur en fer forgé m'a regardée d'un drôle d'air. Je suis repartit en sens inverse avec l'impression d'avoir été pris en flagrant délit.
Quel étrange sentiment. Des taxis redescendent de la gare de Lyon et disparaissent vers le Pont d'Austerlitz. Un camion décharge des fûts de bières dans le bar du coin de la rue. Tout est bien fidèle à ma mémoire. Le seul problème c'est que je ne suis jamais venu ici. Le décors de ma nouvelle est parfaitement conforme à la réalité. Avant même de me m'inquiéter de ce mauvais coups tordu du destin, je me suis mis à marcher longuement le long des quais de Seine. Comme le ferait n'importe quel personnage de roman.
Et tout a coups nous y voilà : quelques uns qui scrutent la mémoire de peur qu'elle ne s'efface. Que les ombres ne disparaissent et que nous oublions au passage qui nous sommes. Seuls les artistes peuvent se risquer à cette étape compliquée de notre civilisation ? Belle et rassurante découverte pour moi... :
Salvatore Puglia du 6 février au 27 mars 2010 4, rue Sainte Anastase 75003 Paris
Voilà une photo, soumise à quelques auteurs sur site internet : le blog à mille mains (façon follow the story ) pour inspirer un texte. Alors pourquoi ne pas jouer ? Je n'ai pas pu résister à l'envie d'écrire un truc (contre l'avis de mon éditeur et en présentant mes excuses à Alecska). A vous de décider... si c'est bien ?
Elle était partie de chez elle ce jeudi en début d'après midi, expliquant à Bertrand qu'elle "montait" en région parisienne au chevet d'un parent soufrant. elle serait de retour demain soir, promis ! Son Mari n'avait pas à s'inquiéter.
Personnellement je déteste cette expression " descendre" dans le midi. Elle est autant ridicule que fausse, il n'y a pas plus de pente vers le sud que de montée vers la capitale. Toujours est-il qu'une fois encore je la suivais. Et en fait de descente j'ai avalé les escaliers, des rues piétonnes mal pavées. Comment peut-on faire des centre villes modernes aux dalles disjointes ou l'on se tord chevilles, talons et roulettes de valises... Comme chaque fois, je m'exécute avec la plus grande discrétion.
Moi qui suis adepte des taxis et des couloirs d'aéroports internationaux me voilà me frayant discrètement dans son ombre, un chemin entre des employés et des clochards. Moi qui suis né pour les grands voyages au bout du monde, je me retrouve à arpenter cette ville depuis des mois. Je la suis inlassablement dans ses pérégrinations, dans des couloirs d'hôtels, des chambres discrètes et ruelles autour de la gare.
Le menu est toujours le même et la recette ne change jamais :
Bertrand, son mari déteste Paris. C'est donc avec joie qu'il décline l'invitation bien pesée de son épouse.
- Je ne te demande même pas si tu veux venir ?
- En pleine semaine tu n'y penses pas et tu sais bien que dormir chez ton grand-père avec tous ces chats ...
Et voilà le mari débarrassé d'une corvée, il pense déjà à son plateau TV de ce soir devant un match de foot. Et l'épouse libérée du joug des convenances se pare pour s'adonner sans retenue aux délices du voyage.
Elle claque la porte et je me met en route au rythme de ses pas, Presque en mesure. J'avoue : j'aime le bruit de ses talons sur le pavé. Elle est élégante, à chaque fois plus belle, insaisissable de liberté. Aucune femme ne peut l'égaler dans ces moments là.
Cette fois encore elle ne va ni à la gare, ni à l'aéroport évidement. En franchissant la grande place piétonne ou bourdonnent seulement quelques tramways, elle se retrouve dans une sorte d'immeuble faisant office de galerie marchande. Elle traverse ce temple de la consommation d'un pas assuré, se glisse par un escalator vers un niveau ultra moderne de bureaux et d'hôtels. Et à peine 15 minutes après avoir quitté son domicile la voilà qui entre dans l'un deux et se jette dans l'ascenseur. Je n'ai d'autre choix que celui de suivre et je me retrouve coincé contre la porte. Le tissus léger de sa robe me frôle. Je remarque ce parfum que je ne lui connaît pas. Troisième étage, la porte s'ouvre, couloir; chambre 309
- Bonjour mon amour.
- Ca va? Tu n'as pas eu de mal à te libérer... Il n'a rien dit ?
- Penses-tu, nous avons toute la nuit enfin ensemble jusqu'à demain soir. Il ne se doute de rien.
- Quel bonheur mon amour de t'avoir à moi seul tout ce temps.
Ils s'enlacent, elle l'embrasse. Ils ont l'air affamé de cet amour et oublient de fermer la porte. Elle tombe sur le lit, il la caresse. La robe claire tombe déjà sur le sol. Elle y restera jusqu'au lendemain soir.
La décence ainsi que la bienséance m'interdisent de passer plus loin le récit de ce laps de temps. Je laisse à chacun le soin d'envisager le déroulement des 24 heures suivantes. Je dirai seulement qu'elles furent de toute évidence à la hauteur de votre imagination, que, sur ce sujet, je devine débordante. Cela me permettant de vous épargner la longue description de contorsions qui se révèlent parfaitement inappropriées au concept d'une énumération rigoureuse.
Le lendemain soir. Il est 21h30 ; elle a reculé le plus longtemps possible le moment de se séparer de son amant.
- S'arracher à cette chambre c'est trop dur.
- Tu veux Le quitter ?
- Et toi tu veux La quitter ?
Les mots des amants qui résonnent dans la nuit, sont toujours les mêmes.
Il est tard elle doit partir, se regarde dans le miroir de l'ascenseur, les yeux clairs.
Il fait doux, elle n'a pas remis sa veste et marche d'un pas déterminé. Elle est songeuse tandis qu'elle fait le chemin vers le domicile conjugal. J'imagine ses pensées. Mentir ? Tout lui dire ! Au fond il y a dans toute cette histoire quelque chose qui l'excite. Elle va continuer à jouer. Elle coupe par une petite rue pour rejoindre la grande place, de là elle sera à deux pas de son appartement.
Et moi, derrière elle, moi qui sait tout, j'avoue que j'aime ces escapades enivrantes et empruntes de romance. Si elle me le demandait je lui dirais volontiers mon opinion. Je lui avouerais mon dévouement. Moi qui la suis depuis des mois, je sais à sa démarche reconnaître quand elle a peur, quand elle est impatiente ou excitée. Si elle savait comme je lui suis fidèle. Mais qui se soucie de mon avis ? Moi qui ne suis après tout que la valise à roulettes qu'elle traîne partout lors de ses faux voyages.
Et voilà un photographe qui interroge la nuit comme un détective privé mennerait l'enquète. Il y a dans les Photos couleurs " ludminaginary " plus du noir et blancs que dans les fims américains des années 50. Richard Vantieclcke cherche quelque chose. Quelque chose que lui seul semble connaître. Et le voilà qui abandonne les personnages pour des lieux. Et il est certain endroits dont la mythologie est si forte que nous ne saurions lui échapper.
Les bains douches publics disparaissent, les vidéo-clubs et les taxi-phones aurons bientôt tous fermés leurs portes. Pourtant subsiste un lieux ou l'on croise encore le petit peuple de Paris. Est ce de ce peuple là dont veut nous parler Richard Vantieclcke ?
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