
" Tout le long du chemin, le vieux Bo racontait des histoires du bayou. Il en connaissait chaque intrigue mais savait les mêler à une dose de poésie sanglante et déroutante. Evan se régalait de ces récits, j’imaginais déjà qu’il allait en concocter une ou deux émissions croustillantes. Bo connaissait chaque propriété, chaque paroisse, et toutes les légendes de ce coté- ci du Mississippi.
– Ici, a-t-il montré du doigt, on raconte qu’un vieux nègre a réussi à dresser un alligator. Il le nourrissait chaque jour. Il lui parlait et la grosse bestiole s’est habituée à venir écouter ses fables. Ces deux-là sont devenus inséparables. Mais quelques temps après la guerre de Sécession, le vieux est mort et sa femme l’a fait enterrer là au bord du marais où il traînait sans cesse. Il parait que depuis, chaque jour, le vieil alligator est venu sur la tombe de son ami. Et certaines mauvaises langues racontent que désormais, c’est la bestiole qui se confie à son vieil ami, lui rapportant les actualités du comté.
J’écoutais Bo déblatérer en conduisant. Evidemment, je n’en croyais pas un mot. J'avais pourtant envie d’avaler cette vérité- là. Pour ma part, je savais déjà que jamais je ne raconterai le récit de cette soirée. "
Extrait des cavaliers électriques
photo SteFanny Brica
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