Elle porte une robe claire et ses cheveux sont défaits. Ce n'est plus la même femme, mais elle n'en est que plus belle. Lorsque je m'approche pour l'embrasser, elle esquive le baiser et me tend les clefs de l'auto.
– Vous savez conduire, j'espère ?
Cette femme a un don bien à elle pour donner de l'élégance à sa façon de s'asseoir en voiture. J'aime les plis de sa robe et l'inévitable drapé académique. Et même le jeu de la bretelle négligemment abandonnée sur l'épaule concourt à donner de la magie à sa beauté, pourtant entendue, de blonde du Sud. Il est vrai qu'ici, la vérité d'un décolleté, la finesse des cuisses sont autant de trésors qu'il serait indignes de garder cachés. J'aime sa façon bien particulière qu'elle a, encore une fois, de plisser les yeux en me regardant. C'est comme si elle cherchait à voir à l'intérieur. Nous prenons l'autoroute et nous parlons peu durant presque une heure.
Elle fume en écoutant la radio. Par moments, elle se penche vers moi comme si elle allait poser sa tête sur mon épaule ou quelque chose comme ça, puis se ravise, puis de nouveau me regarde en faisant cette petite grimace qui la rend attendrissante.
– Vous regardez quoi ? ai–je demandé.
– Vous ! J'ai remarqué que vous n'avez pas un joli visage finalement. Un nez trop gros, les lèvres épaisses et pourtant vous êtes séduisant.
– Vous avez remarqué aussi ? Les nez et les oreilles ne sont pas très harmonieux pris isolément.
– J'ai un très joli nez, a–t–elle dit, soudainement offensée. Elle baisse le pare soleil pour vérifier dans le miroir de courtoisie son affirmation.
– Moi, je le trouve très bien mon nez, dit–elle.
– Vous êtes l'exception en effet, il y en a toujours une. Mais si vous prenez un genou ou un coude isolement, c'est pareil.
– Vous n'aimez pas mes jambes ? Je vais finir par regretter de vous avoir emmené, vous êtes un homme désobligeant doublé d'un mufle !
– Je les adore, ai–je dit, en posant ma main sur son genou. Ce que je voulais dire c'est que la réalité est l'équilibre qui s'instaure entre tous ces éléments qui pris isolément pourraient sembler disgracieux. Voilà tout. Et dans votre cas, je crois que vous pourriez tout à fait servir de démonstration.
– Je ne sais pas si je dois prendre ça pour un compliment ?
Elle a posé sa main sur la mienne, sans doute pour la retirer de sa cuisse. Mais finalement l'y a laissé. Nous finissons la route ainsi, sans plus oser ni bouger ni parler. Il y a des moments ou bien que l'on roule à 80 miles à l'heure, tout semble s'immobiliser.
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